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Quand Fitch rétrograde la France

  • Michaël Nizard, Edmond de Rothschild Asset Management
  • 15 septembre 2025

Un déclassement symbolique

Vendredi 12 septembre, Fitch a abaissé la note souveraine de la France de AA- à A+. L’agence motive cette décision par un déficit persistant, une dette publique déjà à 114 % du PIB et susceptible d’atteindre 132 % en 2034, et par une instabilité politique chronique. À ce niveau, la France se rapproche des ratios italiens, attendus à 135 %, tout en s’écartant d’économies comme l’Espagne ou la Belgique dont les trajectoires apparaissent plus stables. Ce déclassement ne place pas la France dans une situation de crise immédiate, mais il consacre la perception d’un affaiblissement relatif.

Ce déclassement s’explique également par la dégradation continue des équilibres budgétaires. Depuis 2017, les recettes fiscales ont diminué de 1,6 point de PIB pour les ménages et de 0,8 point pour les entreprises, sans être compensées par une réduction de la dépense publique. Celle-ci reste élevée, représentant 57 % du PIB contre 50 % en moyenne dans la zone euro, un niveau comparable à celui de 2017 après un pic pendant la pandémie. Le déficit primaire demeure en deçà du seuil permettant de stabiliser la dette. En analysant l’excédent de dépenses par rapport au reste de la zone euro (7 points de PIB), la majeure partie provient du système des retraites (2,2 points) et de la santé (1,5 point).

Mais une sanction appelée à durer avec la crise politique

Le problème réside dans le fait que cette sanction semble vouée à se pérenniser. Après la chute du gouvernement Bayrou et l’arrivée de Sébastien Lecornu à Matignon, le blocage parlementaire persiste. Faute de majorité solide, la perspective d’une dissolution de l’Assemblée nationale apparaît de plus en plus inexorable. L’incapacité à construire un consensus crédible autour du budget renforce l’idée que la France ne retrouvera pas de sitôt une trajectoire de consolidation claire. Ces fragilités institutionnelles alimentent la perception de la France comme un pays périphérique au sein de la zone euro, plutôt qu’un pilier semi-core.

Des taux d’intérêt en hausse, mais encore contenus

Les marchés obligataires reflètent ce déclassement sans sombrer dans la panique. Le rendement des Obligations Assimilables du Trésor (OAT) à dix ans avoisine 3,5 %, légèrement au-dessus de la Grèce et proche de l’Italie. La hausse des coûts d’emprunt illustre une prime de risque accrue, mais reste bien en dessous des niveaux observés lors de la crise des dettes souveraines. La dette française continue d’être jugée de bonne qualité par la plupart des investisseurs.

Le développement le plus marquant ne concerne pas le rendement à dix ans, mais plutôt l’accentuation de l’écart avec les obligations à trente ans, témoignant d’un steepening souvent interprété, comme une inquiétude inflationniste. Or, les anticipations à long terme sont restées stables. Ce mouvement traduit principalement des facteurs techniques : réduction structurelle de la demande des fonds de pension et assureurs, dynamique démographique diminuant le besoin de titres très longs, et une saturation du marché par les émissions souveraines. En effet, les investisseurs ont eu tendance à privilégier les stratégies de pentification « steepener trades » pour se positionner sur l’écartement de la marge de rendement entre le cinq ans et le trente ans, devant intégrer l’ensemble de ces phénomènes techniques qui concerne d’ailleurs toutes les dettes souveraines (US, UK, Allemande), et manifestant également leurs doutes sur la trajectoire budgétaire française. Dans ce contexte où les actifs refuges sont malmenés, des transferts de flux interviennent sur l’or ou même le sur le crédit investment grade qui reste recherché, alors que sa marge de crédit touche des niveaux historiquement bas. 

En effet, une évolution majeure se produit dans la hiérarchisation du marché de la dette : plusieurs grands groupes français, parmi lesquels LVMH, Airbus, L’Oréal et Axa, empruntent désormais à des taux inférieurs à ceux de l’État. Le contraste souligne à la fois la confiance accordée à ces entreprises et la pression exercée sur la dette souveraine par l’excès d’offre et le volume massif de dette publique émise.

Points de résilience

Ce tableau appelle des nuances. La France dispose de plusieurs atouts : une balance courante proche de l’équilibre, contrastant avec les déficits massifs de la Grèce ou de l’Espagne avant 2008 ; un taux d’épargne des ménages élevé, à 19 %, qui constitue un solide matelas domestique ; une inflation plus contenue que chez ses voisins ; et le filet de sécurité de la BCE, via son Programme de Protection Transitoire (TPI), conçu pour empêcher toute fragmentation excessive de la zone euro.

Il faut aussi rappeler que le risque de contagion au reste de la zone euro demeure très limité. Le problème français est avant tout politique et non financier : la France n’est pas un État en faillite susceptible d’entraîner ses voisins. Même en cas de victoire du Rassemblement National, l’impact resterait contenu par l’absence probable de majorité absolue et par les garde-fous européens. L’exemple italien montre que des spreads peuvent demeurer ordonnés malgré l’arrivée d’un gouvernement perçu comme radical. Enfin, la simple mention du TPI par la BCE suffirait probablement à calmer toute tension excessive sur les spreads.

Une orientation vers une prime de risque durable 

Fitch estime que le déficit dépassera 5 % du PIB jusqu’en 2027, ce qui repousse toute consolidation à l’après-présidentielle. Cette trajectoire est déjà largement intégrée par les marchés. La France perd son statut de pilier semi-core et est désormais considérée comme périphérique dans la zone euro. Mais elle n’entre pas dans une zone de crise. La prime de risque plus élevée constitue désormais une nouvelle normalité, absorbée par les investisseurs dans un contexte où le crédit et les actifs alternatifs continuent d’attirer des flux massifs. C’est bien le risque d’une nouvelle dissolution qui pèsera une nouvelle fois sur la dette française. 

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